Circulaire du 27 septembre 1988
Objet : relative aux perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable
Destinataires : Madame et Messieurs les préfets des départements (Métropole et DOM), Monsieur le préfet de police.
Les événements susceptibles d'engendrer des perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable, qu'ils soient de nature physique, chimique ou biologique, constituent un risque spécifique qu'il convient de prendre en considération, dans le cadre du décret 88-622 du 6 mai 1988 relatif aux plans d'urgence.
En raison des effets engendrés par la défaillance accidentelle d'un système d'adduction d'eau potable sur la vie quotidienne des populations et le fonctionnement des collectivités, il m'est apparu nécessaire que soient organisées, au plan départemental, les modalités d'interventions des autorités responsables, adaptées à ce type de situation.
En conséquence, vous voudrez bien trouver ci-joint mes instructions relatives à la préparation des plans de secours spécialisés ayant pour objet la lutte contre des perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable.
La nécessité de prendre en compte, dans les meilleurs
délais, le risque inhérent à la distribution d'eau
potable, me conduit à vous demander de veiller à ce que ce
document soit établi avant le 1er juillet 1989. Vos services en
feront parvenir deux exemplaires à la direction de la sécurité
civile (bureau de l'organisation des secours), un exemplaire au secrétaire
d'État auprès du Premier ministre, chargé de l'Environnement
et un exemplaire au ministre chargé de la Santé (direction
générale de la santé).
Instructions relatives à la préparation des plans de secours spécialisés ayant pour objet la lutte contre des perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable
Généralités :
I. - Objectifs du plan
II. - Étude des risques potentiels
III. - Évaluation des conséquences
IV. - Comptes rendus auprès de l'administration centrale
Guide pour l'élaboration du plan de secours spécialisé :
I. - Économie du plan
Généralités
I - Objectifs du plan - Un réseau d'alimentation en eau potable constitue un élément déterminant pour le fonctionnement d'une société moderne organisée. Les rôles principaux qu'il est appelé à jouer sont les suivants :
- distribuer l'eau nécessaire à la satisfaction des impératifs alimentaires et au maintien de l'hygiène domestique, rôle essentiel et primordial ;Il est donc impératif que l'ensemble des ouvrages de production, distribution, traitement et stockage soit maintenu en état de fonctionnement satisfaisant, continu et régulier.
- abreuver le cheptel en zone rurale ;
- alimenter certaines industries, si ces dernières ne possèdent pas de réseaux privés d'adduction (les industries agroalimentaires sont particulièrement sensibles à la qualité de l'eau) ;
- assurer, dans la majorité des cas, la protection contre l'incendie et le nettoyage de la voirie.
Ces installations, comme toute réalisation technologique complexe, ne sont pas à l'abri de défaillances diverses. Il peut s'agir, par exemple, d'une pollution d'origine chimique, nucléaire ou biologique, entraînant une atteinte à la qualité de l'eau, ou bien encore, d'une détérioration physique des ouvrages.
Le présent plan est destiné à favoriser une intervention efficace des pouvoirs publics, au niveau départemental, face à ces défaillances. Il concerne uniquement les installations de distribution publique d'eau potable. Par choix délibéré il ne traite que d'atteintes subites et graves .
A ce titre et, eu égard à la spécificité des risques encourus, il appartient à la catégorie des plans de secours spécialisés, définie par la loi no 87-565 du 22 juillet 1987 et réglementée par le décret d'application no 88-622 du 6 mai 1988. Il a pour fonction essentielle de fournir aux autorités et aux responsables de la distribution d'eau une série de mesures à prendre dès le déclenchement de la crise ainsi qu'un catalogue de moyens techniques afin d'assurer un service de secours dans les délais les plus brefs. Il doit, par ailleurs, développer clairement les solutions destinées à mettre en oeuvre une information effective des populations.
Il complète, en l'étendant et en le renforçant, le chapitre 8 " Alimentation de secours en eau potable " du plan départemental d'intervention dont le sommaire est défini par l'instruction interministérielle du 18 février 1985 concernant les pollutions accidentelles des eaux intérieures. Les travaux déjà réalisés à ce titre par les autorités départementales pourront donc être avantageusement transférés à ce plan de secours spécialisé.
L'économie du plan, exposée dans la présente instruction, facilite, de la part des différents responsables, une réflexion sur les risques encourus par leurs installations d'adduction d'eau potable qui doit déboucher, notamment, sur l'établissement de schémas d'aide à la décision en cas de perturbation importante de la distribution d'eau potable.
II - Étude des risques potentiels
1 - Les pollutions de la ressource
La qualité des eaux de captage, souterraines et superficielles, destinées à l'obtention d'eau potable, peut être altérée à la suite d'une pollution. Les pollutions accidentelles de la ressource peuvent avoir des origines très diverses :
- dysfonctionnement de station d'épuration ;Le cas précis dans lequel se produit une pollution accidentelle de la ressource relève plus particulièrement de l'instruction ministérielle du 18 février 1985 à laquelle il est conseillé de se reporter. Néanmoins, il est utile de rappeler ici que des mesures préventives doivent être prises pour limiter les risques de pollutions accidentelles des eaux, en particulier à l'amont des captages d'eau potable. Le Code de la santé publique (article L. 20) et le décret no 67-1093 du 16-12-67 font d'ailleurs obligation de fixer, autour des captages nouveaux, des périmètres de protection. Dans le cas de captages anciens, il est également fortement recommandé de fixer ces périmètres de protection.
- rejet accidentel d'une industrie (incident de fonctionnement, erreur de manoeuvre) ;
- rejet accidentel de produits radioactifs (la situation relève alors du plan de secours spécialisé " transports de matières radioactives ") ;
- rejet accidentel d'origine agricole (pesticides, fuel, lisier, ...) ;
- infiltrations, écoulements issus de décharges autorisées ou non ;
- incident sur un réseau d'assainissement ;
- accidents de transport ;
- eaux résiduaires, conséquences d'opérations de secours (lutte contre l'incendie) ou de décontamination (chimique, radiobiologique...).
Par ailleurs, il est judicieux d'établir des plans de pose de barrage, dans le milieu naturel, pour la protection des points névralgiques, ces plans devant notamment prévoir la détermination, voire la mise en place, a priori, de points d'ancrage adaptés.
2 - Les atteintes sur le réseau
2.1 - La détérioration physique des ouvrages
Les causes naturelles et leurs conséquences - Les phénomènes naturels qui peuvent provoquer de graves perturbations aux installations de distribution d'eau sont connus :
- séisme, volcanisme, glissement de terrain, effondrement de carrière ;Les conséquences pouvant résulter de l'un ou de plusieurs des phénomènes évoqués ci-dessus sont nombreuses et peuvent évidemment atteindre des degrés de gravité très variables :
- foudre, incendie ;
- sécheresse, inondation, gel ;
- tornade, ouragan, neige, givre collant.
-Sur les ressources , effondrement de forage, tarissement de source, rupture de barrage, submersion et donc pollution de forage, pollution de source, embâcle de prise d'eau, difficultés d'accès.Les causes accidentelles - Provenant d'insuffisances techniques, d'imprévoyance, d'erreurs humaines, d'accidents, elles peuvent être dues à : incendies, explosions, rupture de feeder (gaz, oléoducs), écroulement d'ouvrages (conduites sur ponts), radioactivité (largage de centrales nucléaires, instruments à rayons X), ruptures de canalisations par des chantiers de travaux publics, déversement de véhicules accidentés, chutes d'aéronefs..., manque d'énergie électrique, incidents de fonctionnement et fausses manoeuvres à l'intérieur du réseau.
- Sur les stations , submersion, incendie de stations de traitement et/ou de pompage, manque d'énergie électrique, destruction de télécommande et télésurveillance, difficultés d'accès et d'acheminement de produits de traitement.
-Sur les réseaux , destruction d'aqueduc, canalisation emportée, destruction de réservoir.
2.2 - L'altération de la qualité de l'eau au sein du réseau
Il s'agit ici des pollutions intervenant directement sur le réseau,
consécutives à des incidents de fonctionnement, à
des fausses manoeuvres, à des retours d'eau non potable accidentels
(refoulements industriels, siphonnages, etc.), à des interconnexions
avec des réseaux d'eau non potable, à des instillations dans
le réseau de produits nocifs.
3 - L'altération de la qualité de l'eau
L'eau d'alimentation distribuée au consommateur doit respecter des impératifs de qualité concernant des paramètres physico-chimiques et biologiques, définis par la directive du Conseil des communautés européennes no 80/778 du 15 juillet 1980. De la même façon, la ressource superficielle doit, pour être utilisée, appartenir à une catégorie caractérisant un niveau de qualité déterminé par la directive du Conseil des communautés européennes no 75/440 du 16 juin 1975.
L'altération de la qualité de l'eau, qu'elle soit de nature physico-chimique ou biologique, a pour conséquence le dépassement plus ou moins prononcé de tout ou partie de ces normes, ce qui doit constituer un signal d'alarme à l'échelon du distributeur. Néanmoins, la contamination d'origine chimique ou bactériologique peut se produire au sein même du réseau, en aval des installations de production d'eau et n'être alors détectable que par les consommateurs (goût, odeur, coloration, turbidité...) ou par les services chargés du suivi de la santé humaine ou animale, alertés par une morbidité inhabituelle. Dans ces conditions, la détection de l'altération de la qualité de l'eau peut être tardive, et la détermination de son origine délicate.
Il appartient à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (D.D.A.S.S.) avec l'aide des services vétérinaires si le cheptel est en cause, à partir des données dont elle dispose, d'évaluer le risque sanitaire (analyses, impact sur la population...). Le préfet jugera ensuite de l'opportunité de la coupure de l'alimentation en fonction des autres paramètres à prendre en compte : importance de la zone touchée, possibilités d'alimentation en eau de secours, risques technologiques nécessitant la présence impérative d'un réseau d'incendie opérationnel. En effet, l'arrêt de la distribution d'eau potable, consécutif à une interruption momentanée du fonctionnement du réseau, peut être à l'origine de perturbations importantes, en particulier dans une grande ville . C'est pourquoi, il est nécessaire d'établir une comparaison entre les conséquences respectives de l'arrêt ou de la poursuite de la distribution avant qu'une décision ne soit prise.
La possibilité de maintenir le réseau en service en dépit d'une qualité de l'eau non conforme aux normes prescrites a été prévue par la directive du Conseil des communautés européennes no 80/778 du 15 juillet 1980, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. En cas de nécessité, le recours à ce texte est à envisager de la façon suivante :
- conformément à l'article 10 de la directive CEE no 80/778 du 15 juillet 1980, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, l'autorité compétente a le pouvoir, si elle le juge nécessaire, d'autoriser la poursuite de la distribution de l'eau alors que la qualité de celle-ci a subi une altération, dans la mesure où cette décision ne présente aucun risque inacceptable pour la santé publique et où l'approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine ne peut être assuré d'aucune autre façon ;Dans les deux cas, la D.D.A.S.S. est chargée d'établir les concentrations maximales admissibles et les périodes de dérogation qui doivent alors être admises pour les paramètres incriminés. Il est clair que, dans l'esprit de plus large ouverture, rendue nécessaire par les circonstances exceptionnelles, seuls les paramètres faisant l'objet de normes impératives seront alors pris en compte. Dans certaines circonstances, il faudra fixer des valeurs limites pour des substances qui ne sont pas visées par la directive. La direction générale de la santé du ministère de la Santé pourra, dans tous les cas, apporter une aide à l'élaboration des valeurs.
- par ailleurs, l'utilisation d'une ressource en eau superficielle dont la qualité est momentanément insuffisante peut être autorisée dans la mesure où cette décision ne présente aucun risque inacceptable pour la santé publique.
III - Évaluation des conséquences
Les conséquences néfastes pour les abonnés peuvent avoir pour origine, soit directement les perturbations, physiques, chimiques ou biologiques, qui interviennent sur le réseau, soit les interruptions de distribution d'eau qui en résultent.
Une interruption prolongée de la distribution d'eau potable entraîne des difficultés d'approvisionnement dont la résolution s'avère délicate.
A ce sujet, il est bon de rappeler combien il peut être dangereux sur le plan sanitaire et technologique de laisser se vider un réseau de canalisations. En particulier un réseau en dépression risque d'être le siège d'infiltrations d'eau polluée en provenance du milieu extérieur. Il faut également souligner que, dans 90 % des cas, les sapeurs-pompiers utilisent le réseau d'eau potable comme réseau d'incendie.
Il est donc nécessaire, avant de procéder à une interruption de distribution, d'en évaluer soigneusement les conséquences. Il peut être préférable de distribuer provisoirement de l'eau ne répondant pas totalement aux normes de potabilité, quitte à informer la population des limites de son utilisation . Une liste des usagers les plus sensibles à une altération de la qualité de l'eau et à une insuffisance de distribution doit donc être établie. Elle comprendra notamment :
- les dialysés ;La priorité de ces usagers doit être hiérarchisée à l'avance, en gardant à l'esprit la prééminence des besoins des personnes et du cheptel sur ceux de l'industrie.
- les handicapés locomoteurs ;
- les hôpitaux, les établissements de soins, les crèches ;
- les prisons ;
- les sapeurs-pompiers ;
- les industries agroalimentaires ;
- les boulangers, en particulier en milieu rural ;
- les élevages hors sols, dans certains cas.
Par ailleurs, les nourrissons, les femmes enceintes, les personnes âgées et celles de santé précaire seront les premiers à pâtir d'une qualité insuffisante de l'eau, dans l'éventualité d'une poursuite de la distribution. Il sera donc judicieux de prévoir pour leur usage un approvisionnement particulier en eau potable embouteillée.
Il faut également évoquer les conséquences des accidents précédents au deuxième degré et qui pourraient relever d'autres plans de secours comme le minage d'immeubles par " dégâts des eaux ", l'interruption de circulation routière ou ferroviaire...
IV - Comptes rendus auprès de l'administration centrale
L'analyse des accidents et sinistres venant perturber le fonctionnement des réseaux de distribution d'eau destinée à la consommation ainsi que du déroulement des opérations de secours doit permettre, en mettant à profit l'expérience ainsi acquise, d'améliorer la conception du plan de secours spécialisé et d'optimiser la préparation à la lutte contre de tels événements.
A cet effet, les incidents importants, y compris ceux n'ayant pas justifié le déclenchement du plan de secours spécialisé, devront faire l'objet d'un compte rendu, rédigé conformément au modèle présenté en annexe I, qui sera adressé au ministère de l'Intérieur (direction de la sécurité civile, bureau des risques naturels). Une copie devra également parvenir au ministère chargé de la Santé (direction générale de la santé) ainsi qu'au département ministériel chargé de l'Environnement.
Ces comptes rendus sont indépendants de l'information en temps réel à caractère opérationnel qui est adressée par télex au Centre opérationnel de la direction de la sécurité civile (C.O.D.I.S.C.).
Sommaire du plan de secours spécialisé " Lutte contre des perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable "
1. Alerte des autorités administratives
2. Mise en place de la cellule d'évaluation
2.1. Composition de la cellule
2.2. Mission de la cellule
2.3. Répartition des responsabilités
2.4. Particularités de l'alerte des populations
2.5. La procédure d'analyse de l'eau
3. Catalogue des solutions techniques de secours
3.1. Mesures internes à l'unité de
distribution
3.2. Utilisation de ressources pouvant être
employées en secours
3.3. Utilisation d'interconnexions
3.3.1. Les interconnexions
permanentes
3.3.2. Les interconnexions
réalisées d'urgence
3.4. Augmentation de la quantité d'eau fournie
par des ressources non atteintes
3.4.1. Augmentation du débit
instantané
3.4.2. Augmentation de la
durée quotidienne de prélèvement
3.5. Distribution d'eau extérieure au réseau
3.5.1. Détermination
des véhicules de transport
3.5.2. Mise à disposition
des véhicules
3.5.3. Transport et circulation
des véhicules
3.5.4. Précautions
impératives concernant l'utilisation de véhicules citernes
ou de bâches de stockage
3.5.5. Particularité
de la distribution d'eau embouteillée
3.6. Traitement sur place de l'eau
3.7. Gestion de la pénurie
4. Évacuation de la population
II. LES ANNEXES TECHNIQUES
Les annexes feront l'objet d'un document qui ne pourra être consulté
que par les autorités administratives compétentes.
Elles traiteront des points suivants :
Annuaire téléphonique des différentes parties prenantes.En outre, pour chaque unité de distribution comprenant plus de 20 000 abonnés devront être regroupés, à l'avance, les documents suivants, nécessaires à l'organisation immédiate de la lutte contre des perturbations importantes de la distribution d'eau potable :
Carte des points de production.
Carte des zones d'influence des centres de production.
Cartes des zones de distribution.
Schémas des interconnexions déjà réalisées ou organisables rapidement.
Schémas de cloisonnement partiel du réseau.
Carte de situation des activités fortement consommatrices, non prioritaires.
Carte de situation des zones sensibles à protéger.
Carte des puits privés.
Fichier des laboratoires aptes à effectuer des prélèvements et des analyses d'eau.
Fichier des matériels de décontamination.
Fichier de stocks de réactifs.
Fichier des moyens de traitements supplémentaires utilisables en secours.
Fichier des citernes disponibles.
Fichier des distributeurs d'eau embouteillée.
Fichiers hiérarchisés d'abonnés prioritaires et sensibles.
Entreprises de travaux publics.
Fichier matières dangereuses.
Plan d'installation des barrages mobiles pour la protection des prises d'eau.
Carte des fontaines publiques.
Recensement des grands barrages et de leur capacité en eau (objectif : diluer, grâce à des lâchers, la concentration des produits polluants).
- une fiche descriptive pour chacune des unités de distribution regroupant plus de 20 000 abonnés (voir annexe 3) ;
- une fiche de compte rendu opérationnel qui définit, au moment où se produisent les difficultés d'approvisionnement en eau potable, d'une part les besoins en eau potable des abonnés, d'autre part les ressources utilisables en secours, (voir annexe 4).
Cette fiche, dûment complétée au moment des
faits, sera transmise, par télex ou télécopie, dès
les premières heures de l'événement au C.I.R.C.O.S.C.
de zone ainsi qu'au C.O.D.I.S.C.
Le plan de secours spécialisé
I - Économie du plan
1 - L'alerte des autorités administratives
L'alerte initiale sera donnée par le premier témoin de l'accident. Par témoin, il faut entendre toute personne à même de déceler une atteinte à l'intégrité du réseau ou à la qualité des eaux. Le schéma général de l'alerte est donné en annexe 2. L'organisation de celle-ci gagnera à être présentée sous une forme comparable dans le plan départemental. Dans le cas d'une pollution difficilement décelable par le distributeur (produit dont la présence n'est pas recherchée en routine, retour dans le réseau...), l'alerte aura probablement pour origine la D.D.A.S.S., ou les services vétérinaires qui auront alors fait nettement le lien entre une pathologie inhabituelle et une atteinte à la qualité de l'eau. Dans ce cas précis, l'alerte ne sera donc donnée qu'après l'apparition des premiers effets sur la population.
2 - Mise en place de la cellule d'évaluation
2.1 - Composition de la cellule
D'après les premières informations recueillies à la préfecture, le préfet pourra mettre en place une cellule d'évaluation regroupant les différents services concernés. La liste qui suit a un caractère indicatif et ne prétend pas à l'exhaustivité. Elle est destinée à être modifiée ou complétée en fonction de la situation à laquelle se trouvera confronté le préfet.
2.2 - Mission de la cellule
Celle-ci devra, dans un premier temps, déterminer l'origine et la nature de la perturbation détectée. Cette première phase est déterminante et conditionne l'attitude à adopter pour la suite des opérations. Il faut insister sur le fait que, si la perturbation est d'origine biologique ou chimique, les délais de détection risquent, dès le départ, de placer la cellule face à une situation où certaines atteintes sont irréversibles. Ces dommages peuvent concerner le milieu de prélèvement, dans le cas par exemple de la pollution chimique permanente d'une nappe, mais aussi les personnes dont la santé se serait gravement altérée à la suite de la consommation d'eau contaminée distribuée par le réseau.
A ce stade de l'intervention, la D.D.A.S.S. et le distributeur jouent un rôle important en procédant à l'analyse du phénomène, avec leurs moyens d'expertise, afin d'apporter à la cellule le maximum d'informations en indiquant pour chacune son degré de fiabilité.
Le distributeur précise notamment les volumes habituellement mis en jeu et ceux restant disponibles. Il propose les palliatifs pouvant être mis en place : ressources, réserves, interconnexions, traitements provisoires (chloration de désinfection, charbon actif...). Il indique les délais de mise en oeuvre ainsi que les besoins en énergie électrique, en canalisations provisoires.
Après avoir identifié la situation, d'après les informations fournies par les témoins et les représentants locaux, la mission de la cellule sera la suivante :
- effectuer le bilan des événements ;Les comptes rendus successifs seront centralisés par la cellule d'évaluation qui élaborera également les synthèses destinées aux autorités et à l'information des populations. Enfin, sous l'autorité du préfet, la cellule assurera le contrôle et le suivi des opérations.
- proposer les solutions, et en particulier, la fermeture ou le maintien en service du réseau de distribution ;
- organiser les opérations de secours ;
- planifier les opérations et exprimer les besoins en renforts et relèves (appel de laboratoires d'analyses, mise en place de traceurs, élaboration du plan de prélèvement...).
2.3 - Répartition des responsabilités
Le préfet doit préciser dans le plan la mission des différents services réunis au sein de la cellule d'évaluation.
A titre indicatif :
- le service interministériel des affaires civiles et économiques de défense et de protection civile (S.I.A.C.E.D.P.C.) interviendra conformément aux dispositions du plan d'urgence relatif aux accidents entraînant une pollution ou un risque de pollution des eaux intérieures. Il sera chargé de coordonner la mise en place des divers moyens d'intervention en cas de pollution des eaux ;
- la direction départementale des services d'incendie et de secours, plus particulièrement chargée de l'intervention sur le terrain, aura la responsabilité d'assurer la desserte incendie et prendra ainsi ses dispositions en cas d'interruption d'alimentation du réseau ;
- la direction départementale des affaires sanitaires et sociales contrôlera la qualité de l'eau dans le réseau d'eau d'alimentation, donnera les instructions utiles pour y effectuer un éventuel traitement, fixera les normes ainsi que les modalités de vérification de la qualité de l'eau distribuée et déterminera la limitation des usages sur le plan sanitaire. Elle avisera de la situation les responsables des centres de dialyse et des associations de dialyse concernés ;
- les services de police des eaux (D.D.E., D.D.A.F., service de navigation) procéderont à la recherche, à la constatation et à la répression des infractions et fixeront les limitations concernant l'arrosage, l'irrigation... ;
- la direction départementale de l'équipement pourra fournir des moyens de travaux publics s'il y a détérioration d'installations ;
- les maires des communes soumises aux difficultés d'approvisionnement en eau organiseront la répartition et la distribution de l'eau embouteillée ou amenée par camions-citernes. Ils effectueront également la transmission, auprès de leurs administrés, des informations élaborées sous le contrôle du préfet ;
- le distributeur d'eau assurera la conduite technique des opérations effectuées sur le réseau (interconnexions, modifications des débits...). Le maire assumera dans un premier temps la responsabilité de ces interventions. Il sera relayé par le préfet dès le déclenchement du plan de secours spécialisé.
2.4 - Particularités de l'alerte des populations
L'alerte des populations et l'information des médias doivent
être préparées avec le plus grand soin.
Les populations peuvent être prévenues selon différents
moyens :
- radio et presse locale, télévision régionale ;Les utilisateurs sensibles doivent faire l'objet d'une alerte séparée, définie à l'avance.
- véhicules munis de haut-parleur ;
- messages transmis aux écoliers, dans les zones à habitat dispersé, par l'intermédiaire du corps enseignant ;
- alerte " porte à porte " en milieu rural ;
-messages transmis par les responsables d'habitats collectifs, notamment les terrains aménagés pour l'accueil du camping, du caravanage et des habitations légères de loisirs ;
- messages sur les lieux de travail, de spectacles, de grande circulation (centres commerciaux, gares...).
Les autorités pourront tirer parti de l'influence des médias, en diffusant, par leur intermédiaire, une information objective, conçue pour mettre en garde les populations vis-à-vis du danger tout en évitant la génération de mouvements de panique. A cet effet, les dispositions à paraître du code d'alerte (art. 12) de la loi no 87-565 du 22 juillet 1987, relative, notamment, à l'organisation de la sécurité civile, seront mises en oeuvre.
Afin d'éviter l'apparition de nouvelles contradictoires préjudiciables à une bonne information du public, les communiqués de presse doivent émaner de la seule cellule d'évaluation, sous l'autorité du préfet. Les maires assurent le relais de l'information auprès des populations.
2.5 - La procédure d'analyse de l'eau
Pour les cas supposés de pollutions de la ressource en eau ou du réseau de distribution, il est nécessaire que les analyses destinées à identifier et à quantifier les produits présentant un danger soient conduites avec rigueur et célérité . Les autorités administratives doivent en effet disposer dans les plus brefs délais d'une évaluation fiable de l'incidence de la qualité de l'eau sur la santé des usagers, afin d'éviter une interruption hâtive ou injustifiée de la distribution d'eau.
Quelques points importants, concernant l'organisation des analyses, qui doivent être orientées en priorité vers l'appréciation du risque sanitaire, méritent d'être rappelés.
Il convient, en premier lieu, de procéder à la distinction entre :
- d'une part, les analyses à vocation opérationnelle, portant sur des paramètres clés et facilement accessibles aux mesures (conductivité, p H, colorimétrie...), effectuées en temps réel par les services d'incendie et de secours ou d'autres services de l'État à l'aide de matériel d'analyse de terrain et destinées à orienter la décision relative au maintien de l'usage de l'eau, la nécessité d'apprécier rapidement un ordre de grandeur l'emportant sur celle d'obtenir un résultat d'une exactitude absolue ;Par ailleurs, afin de conférer à l'interprétation des analyses toute sa validité, il est nécessaire, dans les cas de pollution présumée de la ressource, de disposer des données quantifiant une pollution chronique éventuelle afin d'être en mesure de faire la séparation entre la pollution de fond et celle d'origine accidentelle. A cet effet, les banques de données, gérées par le secrétariat d'État à l'Environnement et les agences de bassin, précisant la qualité des eaux continentales, doivent être interrogées. De la même façon, la connaissance des débits des cours d'eau concernés est impérative car elle conditionne, à partir de l'analyse de la situation en un endroit précis, la prévision de la progression de la pollution ainsi que de sa dilution.
- d'autre part, les analyses plus élaborées, conduites en parallèle par un laboratoire sanitaire de référence, dont les conclusions, plus tardives, sont destinées à vérifier celles des analyses de terrain et à affiner la connaissance de la situation et l'évaluation des conséquences à plus long terme.
Dans un souci d'efficacité, les analyses devront être effectuées en fonction d'une procédure s'inspirant du schéma directeur des analyses présenté en annexe 5, qui sera élaborée par les services administratifs compétents, dans le cadre du plan de secours spécialisé. Pour la même raison, chaque prélèvement sera accompagné d'une fiche descriptive.
3 - Catalogue des solutions techniques de secours
3.1 - Mesures internes à l'unité de distribution
Le distributeur devra évaluer la capacité des réserves
d'eau, les interconnexions utilisables et leurs débits, les stocks
de réactifs à constituer, le matériel disponible ou
à mobiliser :
- groupes électrogènes ;
- chloromètres de campagne ;
- pompes de secours... et in fine les caractéristiques qualitatives et quantitatives de la nouvelle situation et leur évolution prévisible.
3.2 - Utilisation de ressources pouvant être employées
en secours
Les ressources prévues en secours peuvent avoir été
créées et équipées seulement pour des besoins
de secours, ou le plus souvent être des ressources qui ont été
utilisées puis remplacées en service normal par d'autres
ressources de qualité ou de débit supérieur. Elles
constituent toujours une solution de secours intéressante, mais
pour pouvoir être réellement intégrées à
un plan de secours, elles doivent offrir au moins deux garanties :
- être de qualité suffisante, sachant qu'il pourra toujours être intéressant de remplacer provisoirement une eau de qualité très dégradée par une eau d'une qualité supérieure même si celle-ci n'est pas entièrement conforme aux critères de potabilité ;
- être utilisables à coup sûr en cas de besoin, ce qui suppose que ces ressources soient l'objet d'un suivi aussi régulier et poussé que s'il s'agissait de ressources utilisées en permanence (analyses, entretien du captage et des périmètres de protection, mise en marche des divers appareils...).
3.3 - Utilisation d'interconnexions
Les interconnexions avec d'autres réseaux permettent généralement de livrer à l'usager une eau de qualité satisfaisante, puisqu'il s'agit alors de l'eau habituellement distribuée dans le réseau avec lequel est réalisée l'interconnexion. Le problème qui se pose le plus souvent est quantitatif : il est rare qu'un réseau ait des ressources suffisantes pour subvenir, en plus de ses propres besoins, à ceux du réseau auquel il peut être interconnecté. De même, les configurations des deux réseaux peuvent ne pas se prêter au transport des nouveaux volumes à considérer. Dans de nombreux cas toutefois, l'interconnexion s'avère une solution sûre et appréciable, même si elle doit souvent être accompagnée d'un rationnement ou d'une autre alimentation en eau de secours, voire d'un équipement technique complémentaire.
3.3.1 - Les interconnexions permanentes - La transformation de plusieurs réseaux isolés en un ensemble interconnecté présente souvent des avantages supplémentaires, comme la possibilité de sélectionner et de ne garder que les points d'eau offrant le plus de garanties, à la fois sur le plan qualitatif et sur le plan quantitatif. Cela permet, en outre, d'assurer un meilleur suivi, un meilleur entretien et une meilleure protection de ces points moins nombreux. D'autre part, les ressources en eau laissées de côté pour l'approvisionnement normal peuvent être conservées en secours.
Entre des réseaux autonomes, des interconnexions permanentes peuvent être réalisées, et utilisées uniquement en cas de besoin, selon un accord de mutuelle assistance fixé entre les communes, en particulier pour faire face aux besoins irréguliers des stations touristiques.
L'utilisation d'une interconnexion uniquement au moment où la situation l'exige présente un avantage : si une pollution est détectée après son entrée sur le réseau, l'autre réseau n'est pas contaminé, et son eau peut donc sans problème être utilisée en secours, après nettoyage du réseau touché. Éventuellement, le réseau donneur peut lui même être aidé par un troisième réseau, de manière à suppléer au déficit créé sur ce premier par l'alimentation du réseau atteint.
Il est toutefois à noter que la conception et la réalisation d'une interconnexion nécessitent des précautions particulières.
Il faut s'assurer, avec soin, du bon fonctionnement hydraulique de chacun des réseaux interconnectés, dans les différents cas de mise hors service des points d'eau contaminés, et notamment vérifier que toutes les parties du réseau secouru peuvent effectivement supporter les nouvelles conditions de pression.
Plutôt que de maintenir l'interconnexion fermée en utilisation normale, il semble préférable d'établir constamment un petit débit sur la liaison, afin d'assurer le renouvellement de l'eau de la conduite, quitte à ce que l'une des collectivités dédommage l'autre pour cette fourniture d'eau. Deux cas se présentent alors :
- soit le réseau A débite en permanence dans le réseau B : l'interconnexion comprend alors un clapet anti-retour puis un compteur, le tout intercalé entre deux vannes ;
- soit, du fait des variations des côtes piézométriques des deux réseaux, les sens d'écoulement risquent de s'inverser : l'interconnexion est alors identique à la précédente avec, en plus, un by-pass de l'ensemble vanne/clapet-compteur/vanne comportant les mêmes appareils mais pour le sens inverse d'écoulement.
Dans les deux cas, les vannes permettent, outre le démontage
des clapets-compteurs, le réglage du faible débit transitant
en utilisation normale.
3.3.2 - Les interconnexions réalisées d'urgence - Lorsqu'une interconnexion permanente n'est pas réalisable, il est néanmoins envisageable de mettre en place, en cas de besoin, une interconnexion d'urgence. Une interconnexion mobile peut également être réalisée afin de doubler un tronçon de réseau dont le diamètre des canalisations s'avère être le facteur limitant d'une configuration d'alimentation en eau de secours.
Comme pour une interconnexion permanente, il faut, dans ce cas, étudier en détail le fonctionnement hydraulique du réseau dans cette configuration de secours, de manière à s'assurer que, lorsque cette interconnexion sera en place, elle ne perturbera pas la distribution du réseau donneur et permettra un fonctionnement satisfaisant du réseau receveur. Le plan de secours devra alors comporter un dossier interconnexions consistant en un véritable projet des travaux à effectuer.
Les interconnexions d'urgence peuvent être établies de deux manières :
- grâce à des tuyaux d'alimentation en eau permanente disponibles en stock, posés à même le sol, et, éventuellement, à des pompes de caractéristiques adéquates, dont les fournisseurs possibles auront été prévus ;
- grâce aux tuyaux et aux systèmes de pompage dont disposent les services d'incendie et de secours pour assurer la lutte contre l'incendie. Toutefois, les longueurs de tuyaux que ces services pourront réunir seront toujours limitées. De plus, les pertes de charge dans ces tuyaux sont telles que cette solution est envisageable seulement pour de courtes distances. Enfin, ces interconnexions réalisées avec des tuyaux incendie, tout comme celles réalisées avec des tuyaux d'alimentation en eau permanente, devront être désinfectées avant leur utilisation.
Quelques problèmes spécifiques se posent pour les interconnexions réalisées d'urgence :
- les délais de mise en place et de désinfection, qui peuvent toutefois rester tout à fait acceptables si la mise en oeuvre a été correctement prévue ;
- les traversées de domaine privé : autant que possible, les tuyaux posés doivent suivre les routes et les chemins et éviter le domaine privé ; si cela s'avérait impossible ou trop contraignant, un accord avec les propriétaires concernés peut être recherché à l'avance et classé dans le plan de secours en vue d'une éventuelle utilisation ;
- les franchissements d'obstacles et, en particulier, de voies ferrées, de routes, de rivières, d'autoroutes, peuvent créer des difficultés ; là encore, il est nécessaire de considérer ces questions à l'avance ; éventuellement, des fourreaux définitifs peuvent être réalisés pour passer l'interconnexion le moment venu ;
- l'utilisation de moto-pompes d'incendie avec aspiration directe sur le réseau, dans l'intention d'accélérer le transit, est dangereuse car le réseau risque d'être mis en dépression ; cela suppose, en tout cas, une étude très attentive, à réaliser lors de l'élaboration du plan de secours.
Le financement des frais occasionnés par des interventions pour pollution accidentelle (analyse, interconnexions, par exemple) est prévu par la circulaire d'application de l'article 13 de la loi 87-565 relative, notamment, à l'organisation de la sécurité civile (à paraître).
Il reste un problème délicat, qui est celui du gel des conduites posées à même le sol. Si, comme c'est souvent le cas, l'eau entrant dans l'interconnexion d'urgence est à une température de l'ordre de 8 à 10 °C, et si un débit suffisant, compte tenu de la longueur et du diamètre de la canalisation posée sur le sol, est maintenu en permanence, il est raisonnable de considérer que l'eau n'aura pas le temps de se refroidir suffisamment pour geler avant d'avoir franchi l'interconnexion. Un contrôle de la température à l'extrémité aval de l'interconnexion est de toute manière conseillé.
Lorsque le débit qui devrait être ainsi maintenu s'avère trop important, il est toujours possible, si la résistance mécanique à l'écrasement des tuyaux le permet, de recouvrir ceux-ci de terre ou de bottes de paille pour limiter les échanges de chaleur entre l'eau et le milieu extérieur.
3.4 - Augmentation de la quantité d'eau fournie par des ressources non atteintes
Deux possibilités s'offrent, a priori , pour augmenter le volume d'eau fourni par un point de prélèvement. Il s'agit :
- soit d'augmenter le débit instantané prélevé ;
- soit d'augmenter la durée quotidienne de prélèvement.
3.4.1 - Augmentation du débit instantané - C'est théoriquement possible, sauf pour certains captages de source, s'il existe une marge entre le débit d'exploitation et le débit maximum autorisé pour le cas de pompage dans une nappe souterraine.
Dans la pratique, l'augmentation du débit instantané de prélèvement n'est souvent possible que si elle a été correctement préparée et si quelques aménagements ont été réalisés car :
- le diamètre de la canalisation de refoulement, insuffisant, risque d'introduire des pertes de charge interdisant une utilisation en parallèle du groupe de secours ;
- la puissance installée est souvent limitée aux besoins du groupe de fonctionnement normal ;
- des problèmes se posent également du côté du traitement de l'eau, des antibéliers, des automatismes.
3.4.2 - Augmentation de la durée quotidienne de prélèvement - Lorsqu'il y a pompage, celui-ci est souvent effectué à temps partiel. Il est alors possible d'augmenter la durée de pompage et donc le volume prélevé quotidiennement. Le facteur limitant sera le plus souvent le volume de stockage. Le maximum pourra être prélevé si un automatisme permet la mise en marche des groupes de pompage dès que le niveau des réservoirs s'écarte d'une manière significative du niveau de remplissage maximum.
Dans tous les cas, les conditions d'alimentation des usagers particulièrement sensibles (abonnés prioritaires) devront être examinées dans chaque configuration d'alimentation en eau de secours.
Si le fonctionnement de l'alimentation en eau de secours suppose une
limitation de certains usages, le plan de secours comprendra des indications
précises sur les mesures de rationnement à instaurer et les
moyens d'en avertir les usagers.
3.5 - Distribution d'eau extérieure au réseau - Distribution d'eau par citerne.
Distribution d'eau embouteillée.
La distribution d'eau potable par voie routière, qui doit être préparée à l'avance, constitue l'objet de ce chapitre. Ce système d'alimentation doit être planifié en fonction des différentes situations susceptibles de se présenter.
En effet, l'eau potable distribuée embouteillée ou par camions-citernes sera destinée, en fonction de la qualité ou de la quantité de l'eau fournie par le réseau endommagé, à tout ou partie de la population.
3.5.1 - Détermination des véhicules de transport - La base d'informations sur les véhicules routiers nécessaires à ce type de transport est le parc d'intérêt national (P.I.N.), établi par le ministère chargé des transports à partir du fichier des immatriculations. Le parc représente 70 % des potentialités de transport existantes.
Le S.I.A.C.E.D.P.C. ou la cellule défense de la D.D.E. sont détenteurs de la liste des véhicules recensés dans le cadre du parc d'intérêt national et d'informations précises sur les caractéristiques de ces véhicules.
Le préfet peut :
- déterminer, sur la base des informations du P.I.N. et des services spécialisés (D.D.A.S.S. notamment) le nombre de véhicules qui lui sont nécessaires et ceux qui peuvent répondre à son besoin spécifique ;
- mettre en oeuvre les procédures de mises à disposition des véhicules sélectionnés, par l'intermédiaire de la direction départementale de l'équipement.
3.5.2 - Mise à disposition des véhicules - A la demande du préfet, la D.D.E. prend contact avec les transporteurs concernés pour envisager avec eux les modalités de mise à disposition des véhicules nécessaires.
Cette mise à disposition peut être contractuelle ou prendre la forme d'une réquisition établie par le préfet pour le compte de la commune.
La solution contractuelle, entre le transporteur et la collectivité territoriale bénéficiaire, est toutefois à rechercher, de préférence à la réquisition. Elle a d'autant plus de chances d'aboutir que les transports concernés seront circonscrits à une zone géographique de transport ne nécessitant pas d'autorisation spéciale (autorisation " de zone longue "), soit dans un rayon inférieur à 200 km.
Au cas où le nombre de véhicules disponibles, adaptés aux besoins, ne serait pas suffisant dans le département concerné, il appartient au préfet d'en référer au préfet de zone.
3.5.3 - Transport et circulation des véhicules - A moins d'être effectué sur la base d'une réquisition, le transport doit être considéré comme un transport de marchandises ordinaire, ce qui implique une conformité à la réglementation en vigueur qui stipule, notamment, la nécessité de présence, à bord du véhicule, d'un document de transport attestant du contrat établi entre le transporteur et le bénéficiaire et des titres de transport requis : attestation d'inscription au registre des transporteurs et, le cas échéant, autorisation de transport " de zone longue ".
Les modalités tarifaires de l'opération sont établies par les deux contractants.
En matière de circulation, s'agissant notamment des interdictions prévues par l'arrêté du 27 décembre 1974, lors de la fin de la semaine et des jours fériés par exemple, le préfet pourra prendre les mesures dérogatoires nécessaires, compte tenu de la situation particulière nécessitant ces transports.
3.5.4 - Précautions impératives concernant l'utilisation de véhicules citernes ou de bâches de stockage - Les véhicules utilisés doivent posséder les caractéristiques propres au transport de denrées alimentaires liquides et être adaptés à une distribution fractionnée de l'eau potable. Par ailleurs, il est absolument nécessaire que soit assuré le contrôle du nettoyage de la citerne avant remplissage, avec, par exemple, de l'eau fortement chlorée. Il faut également vérifier que l'eau potable transportée ait été additionnée de la quantité de désinfectant (chlore) suffisante pour éviter les proliférations microbiennes au cours du transport et d'un éventuel stockage. Il est recommandé d'effectuer des contrôles de la teneur en chlore libre résiduel avant usage (méthode à la diéthyl-P-phénylediamine).
3.5.5 - Particularité de la distribution d'eau embouteillée - Il appartient au préfet de faire répertorier les possibilités d'augmentation instantanée de la production des usines d'embouteillage d'eau, afin de faire face à une croissance soudaine de la demande. Le rationnement de la délivrance de l'eau embouteillée chez les détaillants sera prescrit afin de lutter contre les tentatives de constitutions de stocks inutiles par les consommateurs.
En hiver, des précautions doivent être prises afin d'éviter le gel des stocks.
3.6 - Traitement sur place de l'eau
Face à une altération de la qualité de l'eau, il est impératif d'exploiter au maximum les possibilités offertes par les installations existantes. Si celles-ci se révèlent dépassées, la solution technique qui consiste à effectuer un traitement sur place de l'eau peut être envisagée. La connaissance préalable du ou des polluants grâce à une analyse, en adaptant la réponse face au polluant, entraîne une économie appréciable d'énergie et de temps.
Les systèmes de traitement doivent éliminer les particules organiques ou minérales et les substances chimiques nocives. Le traitement se compose, en général, d'une phase de prétraitement, suivie par une phase d'épuration à proprement parler, biologique ou chimique. Il fait appel à des techniques utilisées de façon classique, à plus grande échelle, dans les installations de production d'eau d'alimentation.
Il existe des appareils de taille et débit variés, utilisant
les différents types de traitements ou d'associations de traitements,
en France et à l'étranger. Une documentation sur ces appareils
est maintenue à jour au centre de recherche du service de santé
des armées. Une évaluation de plusieurs appareils a été
effectuée par les services spécialisés de la défense
(PV d'essais disponibles). En tout état de cause, il apparaît
nécessaire que l'appareillage choisi soit robuste, stockable et
utilisable par un personnel non spécialisé.
3.7 - Gestion de la pénurie
La gestion de l'insuffisance de l'alimentation en eau potable, en particulier dans le cas où la situation de pénurie se prolonge, pourra participer de deux démarches complémentaires. Il s'agira, d'une part, d'assurer au mieux la répartition de l'eau disponible et, d'autre part, de faire appel à des ressources jusqu'alors inemployées ou destinées à d'autres usages.
Dans le premier cas, il convient de réaliser une économie significative de l'eau potable encore utilisable en limitant les usages non prioritaires (industries raccordées dont la production est susceptible d'être diminuée ou interrompue temporairement, irrigation, arrosage, lavage de la voie publique ou de véhicules, alimentation des piscines...), en abaissant la pression d'alimentation au robinet du consommateur, voire en assurant la distribution à temps partiel. Il est nécessaire de procéder, en parallèle, à une information raisonnée des usagers par la presse écrite et les radios locales, afin d'éviter la constitution de stocks inutiles, préjudiciables à l'objectif poursuivi. Pour la même raison, la vente d'eau embouteillée chez les détaillants peut être rationnée (par exemple, 3 litres par passage à la caisse).
Dans le second cas, les ressources utilisables (barrage, réservoir, ancien captage maintenu en état de fonctionnement, lac, étang, puits privé...) préalablement recensées, pourront faire l'objet d'une exploitation temporaire.
Si les ressources potentielles appartiennent au domaine de l'État ou des collectivités territoriales, ceux-ci doivent être à même d'en disposer sans contraintes. En revanche, si le propriétaire est une personne privée, l'autorité administrative cherchera à obtenir à l'amiable une autorisation temporaire d'exploitation. Face à un refus de la part du propriétaire et en cas de nécessité absolue, le préfet pourra procéder à une mesure de réquisition exceptionnelle, dans les mêmes formes que celles prévues par la circulaire du ministère chargé de l'environnement, du 25 août 1976, relative aux réquisitions préfectorales en matière d'eau (J.O. du 29-08-76) .
Dans le cas particulier des concessions d'utilisation de l'énergie hydraulique, le préfet pourra s'appuyer sur les accords relatifs aux fournitures en eau existant entre les concessionnaires et les collectivités, prévus par le décret de concession de la chute hydraulique, pris en application du décret 88-486 de procédure du 27 avril 1988.
Par ailleurs, des possibilités nouvelles d'intervention ont été ouvertes par l'article 45 de la loi no 87-565 du 22 juillet 1987 relative, notamment, à l'organisation de la sécurité civile. Les conditions d'application de cet article feront l'objet d'une circulaire prochaine du ministre chargé de la police des eaux.
4 - L'évacuation de la population
Face à une pénurie prolongée d'eau potable, consécutive à une perturbation accidentelle sur le réseau de distribution, il peut être envisagé de procéder à un déplacement de population ou de cheptel vers une zone d'accueil. Cependant cette solution ne doit être utilisée que si les circonstances l'exigent absolument et si la mise en oeuvre de dispositifs d'alimentation de secours n'a pas apporté de résultats suffisants. En effet, le bon déroulement d'une évacuation est assujetti à une préparation et à un contrôle permanent dont la difficulté ne doit pas être prise à la légère.
La décision d'évacuer, lourde de conséquences, sera prise par le préfet qui disposera des conclusions de la cellule d'évaluation afin d'agir en connaissance de cause.
A partir de l'instant où la situation se révèle
suffisamment critique pour justifier une évacuation de la population,
elle ne relève plus du plan de secours spécialisé,
mais du plan ORSEC départemental, voire zonal, qui sera alors appliqué.
II - Annexes techniques
Le répertoire des annexes techniques, dont la liste complète figure en ... (1)Voir ci-dessus sommaire II. de la présente circulaire d'instructions, est destiné à regrouper les documents spécialisés nécessaires à la préparation et à l'organisation de la lutte contre des perturbations importantes sur un réseau de distribution d'eau potable.
Eu égard à la diversité des sources d'informations et à la spécificité de certaines données, il apparaît illusoire d'espérer réaliser un répertoire d'annexes techniques complet et opérationnel sans une collaboration étroite des différents services concernés. Ceux-ci auront donc avantage à se rapprocher, afin d'utiliser au mieux la complémentarité de leurs compétences respectives.
Annexe I : Modèle de compte rendu de perturbation de la distribution d'eau potable
Préfecture du département ...
1 - Renseignements généraux
Date du début de la perturbation : ...
Commune(s) concernée(s) : ...
Distributeur d'eau (préciser le statut) : ...
Incidence directe de l'événement :
- nombre d'habitants : ...
- importance du cheptel : ...
- activités économiques perturbées : ...
- activités sociales perturbées : ...
2 - Identification de la perturbation
- Origine
- détérioration physique du réseau : ...
- pollution de la ressource, du réseau, de nature physique, chimique, organique, radioactive (entourer la réponse adaptée)
- Détection
Interruption de la distribution: partielle, totale (Entourer la réponse adaptée). Durée : ...
Utilisation d'interconnexions : permanentes, provisoires : .. (Entourer la réponse adaptée).
Recours à des ressources supplémentaires (lac, étang, retenue, puits,...) : ...
Distribution d'eau embouteillée, par véhicules-citernes (Entourer la réponse adaptée): ...
Mesures réglementaires prises (limitation, interdiction...) : ...
Opérations de dépollution de la ressource : ...
Difficultés particulières : ...
Délais de retour à la normale : ...
4 - Suites judiciaires et financières
Identification du responsable : ...
Poursuites judiciaires éventuelles : ...
Nature des travaux de secours, études et expertises commandées : ...
Procédure de passation de commande (contrat verbal, contrat écrit, réquisition) : ...
Autorité administrative ayant passé commande (préfet, maire, autre) : ...
Personne publique pour le compte de qui commande a été passée (État, département, S.D.I.S., commune, autre) : ...
Coût financier (T.T.C.) (Seules sont visées les opérations liées aux secours, à l'exclusion de tous travaux d'investissement ultérieurs) : ...
Annexe II : Le schéma de l'alerte des autorités administratives
L'alarme initiale sera en fait donnée par le premier témoin de l'accident. Celui-ci doit prévenir immédiatement une autorité administrative ou le service responsable des eaux. Cette autorité peut être le service d'incendie et de secours, la gendarmerie, la police, le maire. L'autorité alertée devra prévenir les autres services administratifs énumérés ci-dessus ainsi que les autorités préfectorales. Il appartiendra alors à ces dernières de vérifier en retour que les services administratifs précités ont bien été avertis et d'informer de la situation le centre opérationnel de la direction de la sécurité civile
(CODISC), par l'intermédiaire du préfet de la zone de défense (CIRCOSC).
Le CODISC retransmettra les informations aux cabinets des ministres
concernés.
Annexe III : Fiche descriptive des unités de
distribution regroupant plus de 20 000 abonnés
Unité de distribution : ...
Commune(s) desservie(s) : ...
Identité et statut du distributeur d'eau : ...
Documents à regrouper :
Annexe IV : Fiche de compte rendu opérationnel
1 - Définition des besoins en eau potable
L'évaluation des besoins en eau potable tient compte de la nécessité d'alimenter en eau la population, le cheptel et les industries consommatrices. Étant donné la situation de pénurie, les besoins de chacun de ces secteurs doivent se limiter au maximum compatible avec un fonctionnement satisfaisant. Les besoins sont à exprimer en m3/j.
Réseau de distribution concerné : ...
Commune de : ...
Besoin journalier en eau de la population (Bp).
Bp = Effectif (Effectif de la population = population permanente + population saisonnière) de la population x besoin unitaire journalier réduit (Le besoin unitaire journalier réduit est compris entre 20 et 30 litres) = ... x ... = ... m3/j
Besoin journalier en eau des personnes sensibles (hôpitaux, cliniques, foyers de personnes âgées, dialysés, personnes difficiles à déplacer) (Bs).
Bs = ... m3/j
Besoin journalier en eau du cheptel (Bc).
Bc = Effectif du cheptel (en UGB) (1 UGB = 1 unité de gros bétail = 1 vache laitière de 600 kg en lactation) x besoin journalier (Le besoin journalier par UGB correspondant à environ 100 litres) par UGB = ... x ... = ... m3/j
Besoin journalier en eau des industries raccordées (Bil) n'étant pas en mesure de s'alimenter de façon autonome.
Bil = ... m3/j
Besoin journalier en eau des industries dont l'arrêt doit être évité (Bi2).
Bi2 = ... m3/j
Besoin journalier en eau pour la protection contre l'incendie (Bsp).
Bsp : ... m3/j
Besoin en eau total journalier (Btl).
Bt1 = Bp + Bc + Bs + Bsp + Bil = ... + ... + ... + ... + = ... m3/j
Besoin en eau total journalier réduit (Bt2).
Bt2 + Bp + Bc + Bs + Bsp + Bi2 = ... + ... + ... + ... + ... = ... m3/j
2 - Ressources susceptibles d'être introduites au sein du réseau dont le fonctionnement est perturbé (Ri)
Ressource fournie par interconnexion(s) déjà en place (Ril).
Ressource fournie par interconnexion(s) organisable(s) rapidement (Ri2).
Ri = Ri1 + Ri2 = ... + ... = ... m3/j
3 - Besoin en eau à fournir indépendamment du réseau de distribution
Il s'agit ici de l'eau distribuée par véhicule-citerne (camion, train...) (Bc1 ou Bc2).
Bc1 = Bi1 - Ri = ... - ... = ... m3 /j
Bc2 = Bi2 - Ri = ... - ... = ... m3 /j
4 - Besoin en eau potable embouteillée
L'eau potable embouteillée doit être réservée exclusivement à la boisson et à la préparation des aliments.
Bee = effectif de la population x 2 = .. bouteilles de 1,5 l/j
5. Stock d'eau disponible dans les réservoirs de l'unité de distribution à l'heure du présent compte rendu (S)
S = ... m3
Le délai nécessaire à la progression du front de
pollution jusqu'aux installations de pompage peut être mis à
profit afin de remplir les réservoirs au maximum de leur capacité.
Annexe V : Le schéma directeur des analyses
En préliminaire à toute procédure d'analyse d'eau présumée polluée, il est indispensable, afin de discriminer la pollution chronique et la pollution accidentelle, de disposer des paramètres caractérisant la qualité de la ressource immédiatement avant la pollution accidentelle en cause. Cet état " zéro " sera déterminé en procédant à l'analyse des prélèvements effectués en amont immédiat du lieu du déversement.
1 - Analyses de terrain
Élaborer un plan de prélèvement établissant notamment :
Le canevas en fonction duquel sont organisées les analyses doit être modifié, en principe dans le sens d'un allégement, au fur et à mesure du développement de la situation. Par ailleurs, il apparaît inutile, pour des raisons financières, de procéder à une nouvelle analyse, portant sur les mêmes paramètres, tant que les résultats de l'échantillon précédant n'ont pas été dépouillés.
Il pourra se révéler précieux, afin de réduire les délais d'analyse, de disposer d'échantillons concentrés et identifiés des produits présumés à l'origine de la pollution.
2 - Analyses du laboratoire de référence - Préciser :
- les responsables des prélèvements ;
- les responsables du transport des échantillons ;
- les responsables de l'analyse.
3 - Rapport d'analyse à communiquer par télex ou télécopie aux autorités départementales et centrales
Points importants :
- préciser en toutes lettres les unités utilisées
;
- veiller à transmettre le rapport d'analyse établi par
le laboratoire et non pas un résumé susceptible d'altérer
l'information ;
- procéder à une réduction d'échelle (9/10)
des courbes et des graphiques présentés en format A4, afin
que leur transmission par télécopie puisse s'effectuer dans
son intégralité.