Direction générale de la
santé
Direction des hôpitaux
Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé
Circulaire DGS/DH/AFSSAPS n° 2000-311 du 7 juin 2000 relative aux spécifications techniques et à la sécurité sanitaire de la pratique de l'hémofiltration et de l'hémodiafiltration en ligne dans les établissements de santé
NOR : MESP0030244C
(Texte non paru au Journal officiel)
Références :
Le livre V bis du code de la santé publique, notamment les articles L. 665-6 et R. 665-49, et le livre VII du code de la santé publique, notamment les articles L. 712-8 et R. 712-2.
La ministre de l'emploi et de la solidarité, la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales) [pour action et diffusion]) ; Mesdames et Messieurs les directeurs d'agence régionale de l'hospitalisation (pour information et action)
Il est demandé
à chaque direction départementale des affaires sanitaires et sociales de transmettre
la copie de la présente circulaire aux établissements de santé du département
pratiquant l'épuration extra-rénale.
La présente circulaire a pour objet de définir les conditions de sécurité sanitaire
de pratique de l'hémofiltration et de l'hémodiafiltration en ligne.
1. Rappels techniques
La technique d'hémodialyse fait appel à deux mécanismes principaux de transfert de solutés : la diffusion et la convection. Selon l'importance relative des mécanismes mis en jeu, les modalités techniques de l'hémodialyse peuvent différer et sont dépendantes de la perméabilité des membranes d'échange (membranes à haute et basse perméabilité).
1.1. Hémodialyse conventionnelle
Dans l'hémodialyse conventionnelle, le transfert des solutés s'opère sur un mode principalement diffusif, tandis que celui du sodium et de l'eau s'opère sur un mode principalement convectif, répondant à l'ultrafiltration.
1.2. Hémofiltration
Dans l'hémofiltration, le transfert des solutés est purement convectif. L'hémofiltration impose le recours à une membrane de haute perméabilité. La balance volémique du patient est maintenue en réinjectant, dans le circuit sanguin, une solution de substitution de composition voisine de celle d'un ultrafiltrat plasmatique normal, à un débit équivalent à celui du débit d'ultrafiltration, diminué du débit correspondant à la perte de poids désirée.
1.4. Hémodiafiltration
L'hémodiafiltration combine à la fois les propriétés de l'hémodialyse conventionnelle et de l'hémofiltration. Le transfert des solutés est d'une part diffusif, ce qui assure une soustraction efficace des substances de déchet de faible poids moléculaire, et d'autre part convectif, ce qui accroît l'extraction des solutés de poids moléculaire élevé. L'hémodiafiltration nécessite donc à la fois un dialysat et une solution de substitution.
1.5. Hémofiltration et hémodiafiltration en ligne
Les techniques d'hémofiltration et d'hémodiafiltration en ligne nécessitent des volumes importants de solution de substitution. Elles reposent sur la production extemporanée de la solution de substitution à partir du dialysat affluent.
2. Conditions
de sécurité sanitaire
2.1. Pré requis
Ces techniques
de dialyse ne peuvent être mises en oeuvre que dans les établissements de santé,
au sein des centres de traitement de l'insuffisance rénale chronique, disposant
d'une autorisation d'appareil de dialyse dans les conditions fixées aux articles
L. 712-8 et R. 712-2 du code de la santé publique, à l'exception des unités
d'autodialyse.
La durée et la fréquence des séances d'hémo(dia)filtration « en ligne » ne doivent
pas être inférieures à celles de séances d'hémodialyse conventionnelle.
Ainsi, l'hémofiltration et l'hémodiafiltration en ligne imposent obligatoirement
la présence d'un médecin néphrologue.
2.2. Marquage CE des dispositifs médicaux concernés
Il est impératif d'utiliser des dispositifs médicaux (générateurs, moniteurs, filtres du dialysat) ayant le marquage CE pour l'hémofiltration ou l'hémodiafiltration en ligne. Leur utilisation se fait en respectant les consignes du fabricant données dans la notice ou le manuel d'utilisation du dispositif.
2.3. Qualité
de l'eau utilisée, du dialysat et de la solution de substitution
2.3.1. Eau d'alimentation des générateurs de dialyse
La qualité
de l'eau est essentielle dans une technique « en ligne ». Cette eau doit répondre,
au minimum, aux indications de la Pharmacopée européenne en vigueur pour « l'eau
pour dilution des solutions concentrées pour hémodialyse » (3e édition, n° 1167).
Il est impératif de faire une analyse de risques préalable pour mettre en adéquation
le traitement de l'eau avec les connaissances de la qualité de l'« eau matière
première » et ses variations dans le temps, en étant vigilant notamment sur
sa composition en substances organiques (composés organo-halogénés, pesticides,
etc.). Ces procédures d'évaluation et de gestion des risques seront précisées
par voie de circulaire. Il est nécessaire de disposer d'un système de traitement
permettant d'assurer, en permanence, une qualité de production d'eau compatible
avec la pratique de l'hémo(dia)filtration en ligne. Il est conseillé d'utiliser
le procédé de double osmose inverse ou tout autre à efficacité similaire ou
supérieure.
L'établissement doit mettre en place un système d'assurance qualité pour la
surveillance du traitement de l'eau, avec l'ensemble des professionnels concernés
par le développement de la méthode d'hémo(dia)filtration en ligne (pharmaciens,
néphrologues, infirmier(e)s, ingénieurs biomédicaux, techniciens de dialyse...).
Il est conseillé, au minimum, de relever quotidiennement la mesure affichée
de la conductivité de l'eau produite, en la comparant aux valeurs initiales
obtenues lors de la validation de l'installation, et de consigner cette valeur
sur le cahier de traçabilité.
Un contrôle des paramètres physico-chimiques, microbiologiques et endotoxiniques
est nécessaire après chaque intervention majeure sur le système de production
d'eau, la boucle et/ou le système de distribution d'eau.
2.3.1.1. Paramètres physico-chimiques de l'eau d'alimentation des générateurs
Une analyse physico-chimique, en départ de boucle, est obligatoire au démarrage de la technique pour validation. Il est préconisé de surveiller, au moins trimestriellement, les paramètres physico-chimiques figurant dans la monographie n ° 1167 de la Pharmacopée européenne.
2.3.1.2. Qualité microbiologique et endotoxinique de l'eau d'alimentation des générateurs
2.3.1.2.1. Les endotoxines
Pour les endotoxines, l'eau d'alimentation des générateurs doit répondre, au minimum, aux indications de la monographie n ° 1167 de la Pharmacopée européenne (taux inférieur à 0,25 UI/ml).
2.3.1.2.2. Microbiologie
Le nombre
de germes totaux doit être inférieur à 100 UFC/l (unités formant colonies par
litre) et non inférieur à 100 UFC/ml (unités formant colonies par millilitre)
comme pour l'hémodialyse conventionnelle.
Le dénombrement des germes se fera sur un échantillon d'un litre, en utilisant
la technique de filtration sur membrane, après mise en culture sur milieux pauvres,
de type TGEA ou R. 2A, pendant une durée minimale de 7 jours à 20-22° C.
En cas de culture positive, l'identification des germes est indispensable.
La fréquence des contrôles microbiologiques et endotoxiniques de cette eau doit
avoir lieu une fois par semaine au démarrage de la méthode lors de sa validation,
pendant une durée minimale d'un mois, puis une fois par mois.
2.3.2. Le dialysat après une première ultrafiltration dit « dialysat ultrapur »
Les contrôles
microbiologique et endotoxinique du dialysat affluent doivent être effectués
au minimum tous les mois, et après chaque intervention sur le circuit hydraulique
du générateur, en tenant compte des recommandations du fabricant du système.
Ces contrôles de dialysat seront effectués à l'entrée du dialyseur sur chaque
générateur.
Il est recommandé de recueillir un échantillon de 100 ml de dialysat affluent.
Les méthodes d'analyse de cet échantillon et les normes sont celles définies
pour l'eau pour hémo(dia)filtration en ligne.
2.3.3. La solution de substitution
La solution
de substitution est produite par une nouvelle ultrafiltration du dialysat «
ultrapur ». La technique doit garantir la qualité microbiologique et endotoxinique
exigée.
Cette solution de substitution ne doit contenir aucune bactérie dans l'échantillon
prélevé et doit contenir moins de 0,05 UI/ml d'endotoxines.
Un contrôle microbiologique et endotoxinique sera réalisé au minimum une fois
par mois, et par générateur. Il portera sur un échantillon de 50 ml au minimum,
prélevé en dehors d'une séance d'hémo(dia)filtration. Les méthodes d'analyse
de cet échantillon sont celles définies pour l'eau. Néanmoins, il est souhaitable,
pour augmenter la sensibilité microbiologique de la détection, de procéder à
une séance d'hémodiafiltration fictive tous les deux mois, au cours de laquelle
sera filtré l'équivalent de 20 litres d'infusat, sur une membrane de 0,45 …m.
Cette membrane sera cultivée en utilisant les techniques et milieux recommandés
ci-dessus.
La solution de substitution est à analyser dans les mêmes conditions que celles
décrites précédemment, deux jours de suite, avant de pouvoir être réinjectée
au patient pour la première fois. Si les données microbiologiques et endotoxiniques
correspondent aux valeurs de sécurité exigées, la méthode d'hémo(dia)filtration
en ligne est validée.
Les fabricants de dispositifs médicaux destinés aux techniques d'hémo(dia)filtration
en ligne s'engageant, au travers du marquage CE, à fournir des ultrafiltres
permettant d'obtenir un dialysat et une solution de substitution conformes aux
exigences microbiologiques définies ci-dessus, il est impératif que les utilisateurs
se conforment aux notices d'utilisation.
2.4. Gestion des installations
Avant de commencer
la séance, il est nécessaire de vérifier l'intégrité du système selon les recommandations
du fabricant spécifiées dans le manuel d'utilisation, et de consigner les données
dans le cahier de traçabilité, qui sera constitué dès l'installation de la méthode
pour suivre l'ensemble du dispositif d'hémo(dia)filtration en ligne (données
relatives à tous les ultrafiltres, aux désinfections et détartrages des générateurs,
à la maintenance...).
La désinfection des générateurs doit se faire après chaque séance d'hémo(dia)filtration
en ligne, selon les indications du fabricant. La décalcification des générateurs
et les changements des ultrafiltres doivent être effectués selon les recommandations
du fabricant.
3. Conduite
à tenir en cas d'incident fébrile ou de non conformité
des résultats microbiologiques ou endotoxiniques
En cas de réaction fébrile per ou post-dialytique ou lors de résultats non conformes microbiologiques ou endotoxiniques, il est nécessaire de suspendre la technique d'hémo(dia)filtration sur le générateur en cause, tant que l'origine de l'incident n'a pas été élucidée et les mesures correctives entreprises.
4. Déclaration des incidents impliquant un matériel médical
Il est obligatoire
de déclarer tout incident mettant en cause un dispositif d'hémo(dia)filtration
en ligne, selon les dispositions des articles L. 665-6 et R. 665-49 du livre V bis
du code de la santé publique, relatives aux déclarations obligatoires des incidents
impliquant des dispositifs médicaux.
Vous veillerez particulièrement à ce que, lorsque ces techniques de dialyse
sont mises en oeuvre, elles le soient selon les modalités de la présente circulaire,
qui sera publiée au Bulletin officiel du ministère de l'emploi et de la solidarité.
Vous voudrez bien nous informer des éventuelles difficultés rencontrées à l'occasion
de son application.
Le directeur
des hôpitaux,
E. Couty
Le directeur
général de la santé,
Professeur L. Abenhaim
Le directeur
général
de l'Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé,
Le directeur général,
P. Duneton
Références
Canaud B et
coll. : On-line hemodiafiltration : state of the art. Neprol Dial Transplant
1998, 13 (suppl. 5) : 3-11.
Ledebo I : On-line hemodiafiltration : Technique and therapy. Adv Renal Replacement
Therapy 1999, 6 : 195-208.
Lonnemann G : Assessment of the quality of dialysate. Nephrol Dial Transplant
1998, 13 (suppl. 5) : 17-20.
Man NK, Zingraff J et Jungers P : Principes physico-chimiques de l'hémodialyse
In : L'hémodialyse chronique. Médecine-Sciences Flammarion, Paris, 1996, 127
pages.
Mion C et coll. 1989 : Dialysat au bicarbonate stérile et sans pyrogène : un
progrès en hémodialyse applicable dès aujourd'hui. Actualités Néphrol 1989,
Flammarion, Paris : 289-326.
Pass T et coll. : Culture of dialysis fluids on nurtrient-rich media for short
periods at elevated temperatures underestimate microbial contamination. Blood
Purif 1996, 14 : 136-145.
Petitclerc Th : Hémodialyse : principes généraux et modalités de traitement.
Médecine Thérapeutique 1998, 7 : 557-566.
Ward RA et coll. : Are current standards for the microbiological purity of hemodialysate
adequate ? Seminars in Dialysis 1989, 2 : 69-72.
Direction générale de la santé
Direction des hôpitaux
Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé
RECTIFICATIF
NOR : MESP0030244Z
(Texte non paru au Journal officiel)
Cette circulaire est parue dans le Bulletin officiel MES n° 2000/25,
page 285.
A la page 286 :
Au lieu de : « 1.4 »,
Lire : « 1.3 » ;
Et au lieu de : « 1.5 »,
Lire : « 1.4 ».
(Le reste sans changement)